A l'assaut des glaciers

Article 8 du 5 au 15 juin :

Nous ne croyons pas qu'il y ait un « Créateur » mais s'il y en a un, en Norvège, il s'est un peu lâché. Nous l'avions déjà vue mais cette semaine c'est confirmé. Tout est démesuré, grandiose, magique, les couleurs sont belles, que ce soit avec les nuages, sous la pluie ou quand le soleil brille. D'ailleurs on passe très rapidement de l'un à l'autre. Il y a souvent plusieurs saisons dans la même journée. Tout est à l'échelle 10, nous sommes au niveau de la mer et quelques mètres plus loin à 2000m avec le paysage des Alpes. La météo n'est pas au beau fixe mais nous arrivons à passer entre les gouttes et parfois le matin nous attendons un peu pour pouvoir démarrer sans la pluie mais une fois partis... il faut se faire une raison.

Nous avons rejoint la ville d'Alesund qui est sur la véloroute1 que nous allons quitter ensuite. La vieille ville en bois a été complètement détruite par le feu en 1904. Elle a été reconstruite en style Art nouveau : grosses et grandes façades en pierre. Nous déambulons dans la ville, il fait beau, les terrasses sont accueillantes et nous gravissons 418 marches pour avoir une vue aérienne du fjord le long duquel elle est bâtie, composé d'une multitude de petites îles. Comble de l'exotisme, nous mangeons dans un pub irlandais.

Dimanche, nous faisons une pause à Stordal car le temps est très mauvais, il pleut toute la nuit et la journée. On découvre qu'il y a un restaurant qui propose une cuisine norvégienne dans la petite ville. C'est gargantuesque mais nous gouttons à tout : buffet d'entrées, de viandes cuisinés et de desserts. Avec le vélo, nous pouvons nous lâcher et manger tout ce que nous voulons, pas de régime.

Dimanche soir : coup de massue, le RN est en tête et Macron dissout l'assemblée nationale, il impose de nouvelles élections fin juin et début juillet. Nous ne serons pas rentrés. Nous souhaitons voter, comment allons nous faire ? C'est le questionnement quand nous rencontrons d'autres français en début de semaine. Les informations évoluent dans le cours de la semaine. Au début nous avons pensé retourner à Oslo pour faire une procuration à l'ambassade, seul lieu où cela était possible. Puis par l’intermédiaire d'un jeune qui voyage aussi en Norvège on apprend que l'on peut en faire une à Bergen le 24 juin. C'est super c'est sur notre route. A chaque fois nous adaptons nos itinéraires.

Cette semaine nous allons rejoindre Geiranger, ville touristique qui se situe au fond d'un grand fjord d'une centaine de kilomètres mais pour y arriver nous allons devoir traverser 3 tunnels autorisés aux vélos, le plus long fait 3,5km et de grosses cotes pour passer deux cols à 400 et 610 m qui nous amènent à un belvédère qui surplombe le fjord de 600m. C'est fabuleux ! Une grande descente nous permet de rejoindre la ville. C'est le Chamonix du coin avec la mer en plus. Au camping, notre petite tente côtoie des dizaines de camping-cars mais aussi les gros ferrys. Chaque matin ils arrivent, installent des plate-formes flottantes et des milliers de croisiéristes déambulent dans la petite ville, où prennent les bus qui les attendent pour une excursion. Le soir le ferry reprend la mer. C'est à la fois beau mais déstabilisant, ce tourisme de masse nous met mal à l'aise.

Notre idée est de longer trois parcs nationaux, le Reinheimen, le Breheimen et le Jutunheimen dont les sommets sont autour des 2400m avec des glaciers qui descendent assez bas. Pour cela il nous faut quitter Geiranger par une route qui nous monte à 1000m en 18 km, dans cette montée sous la pluie, nous sommes encouragés par les conducteurs qui nous font des petits signes de la main. Au col quelques flocons de neige tombent sur la sacoche avant du vélo mais nous allons nous réfugier dans l'hôtel pour nous sécher et manger notre pique nique agrémenté d'un café. Dans la descente nous sommes invités à prendre un autre café dans un camping-car par un couple d'allemands âgés de 74 et 78 ans, on a encore de beaux jours devant nous pour voyager.

Ces routes panoramiques de Norvège sont empruntées par les touristes, il nous est impossible de dire combien de camping-caristes nous ont croisés ou doublés mais ils sont très nombreux, souvent patients et bienveillants pour nous cyclistes qui roulons parfois à 5 km/h dans les montées. Par contre nous ne croiserons que quelques cyclistes sur cet itinéraire qui est assez difficile. Lors d'un pique-nique sur un belvédère nous discutons avec des français, des belqes, des canadiens. Chacun voyage à sa façon, certains pour 8 jours, d'autres pour deux mois, d'autres qui prennent le temps de randonner, visiter et nous les cyclistes au long court. Nous avons du plaisir à partager chacun nos expériences. Il y a beaucoup de gens à se promener mais les espaces étant immenses nous avons souvent l'impression d'être assez seuls.

En général le temps est très changeant, mais vendredi quand nous avons pris la route du Sognefjellet plus communément appelée la route 55 qui monte à 1428m d'altitude le soleil est au rendez-vous ce qui nous permet de savourer les paysages lors de la montée, les pauses sont nombreuses. Au col des équipes s’entraînent sur les pistes de ski de fond, on ne s'étonne plus des performances des norvégiens en biathlon.

Les gros cairns sur le bord de la route sont très nombreux car depuis des temps immémoriaux des hommes ont bravé les dangers de la nature et sont partis à pied ou à cheval pour traverser le plateau de Sognefjellet, les voyageurs pouvaient trouver leur chemin même avec la brume ou le brouillard. Aujourd'hui ce chemin cairné «Varderekkja» est un chemin culturel et historique.

Nous décidons de bivouaquer en haut du col pour profiter le lendemain encore du panorama mais dommage le matin il pleut et les nuages sont bas.

Nous descendons très rapidement de 1300 m à O m et là ce sont plutôt les freins qui sont mis à rude épreuve, nous retrouvons la mer à Skjolden où nous restons au camping deux nuits avant de repartir direction Bergen.